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Looking for Catharsis - HAMLET ou la Catharsis dans la Catharsis !?


Un père assassiné…

Une mère remariée…

Un oncle à affronter…

Hamlet écrit-il sa propre Tragédie ?



Une Violence à apprivoiser…

Un ressentiment à dépasser…

Des émotions à apaiser…

Hamlet se raconte-t-il des histoires ?



Une destinée… à réparer !

Une Ecube… à pleurer !

Un Roi… à purger !

Hamlet se cherche-t-il une thérapie ?




Hamlet fera appel au Théâtre pour dénouer sa situation tragique.

Théâtre dans le Théâtre, la Tragédie HAMLET est une Mimesis dans la Mimesis.

Pour le Prince Hamlet, sa Tragédie serait-elle également une Catharsis dans la Catharsis ?




La Tragédie est … une imitation/représentation (Mimesis)…

… une action noble conduite jusqu’à sa fin… ;

…qui par l’entremise de la pitié et de la crainte,

accomplit la purgation (Catharsis) des émotions de ce genre.

Aristote, POETIQUE, Chap. VI – Trad. M Magnien, Ed. Le Livre de poche.


*Pour le spectateur de Tragédie, l’histoire, la fable, l’intrique, le scénario, le story-telling,

met sur scène un personnage dans une situation de Violence qui inspire des émotions de pitié & crainte :

Violence d’un meurtre ; pitié pour la victime ; crainte du puissant.

La Violence doit prendre fin pour que les émotions de la Violence soient purgées.

La Mimesis tragique doit s’achever pour que la Catharsis s’accomplisse.

L’achèvement du récit par la résolution de la Violence,

sont les conditions de la purgation, évacuation, apaisement des émotions,

pour qu’alors la Mimesis de l’artiste fasse effet de Catharsis chez le spectateur.


Hamlet écrit-il sa propre Mimesis pour se créer sa propre Catharsis ?

La Catharsis d’Hamlet, permettra-t-elle la Catharsis du spectateur ?

Avec Hamlet, partons à la recherche de la Catharsis ;

Looking for Catharsis!



Réparer ! Pleurer ! Purger !

3 paroles*, 3 verbes, 3 actions qui nous permettent le suivre le fil de la pensée d’Hamlet ;

Pensée tragique en ce qu’elle associe, Mimesis & destinée, Violence & sentiments, Catharsis & mort.

*Paroles, paroles, paroles !!! Words, words, words !!!



I/ Mimesis* & destinée - Hamlet ou la destinée cathartique ?


*Plus on cherche la Catharsis, plus on trouve la Mimesis !

Dans LA POETIQUE, Aristote a surdéveloppé la Mimesis tragique

en restant elliptique sur la Catharsis ;

Nous n’avons d’autre choix que d’aborder, de circonscrire la Catharsis,

par les conditions de sa mise en place.


Tout CELA pour quoi ?

Avant de créer LA CHOSE avec le Théâtre ;

… the play 's THE THING

Wherein I'll catch the conscience of the king. A2S2

Hamlet va trouver LA CHOSE avec le Spectre : une destinée, un destin, une histoire !

What, has THIS THING appear'd again to-night ? A1S1


Parole n°1 Réparer

The time is out of joint: O cursed spite,

That ever I was born to set it right!

Notre époque est détraquée ; maudite destinée,

Ne suis-je jamais né que pour tout REPARER ! A1S5


Ce Distique* ce situe à la fin de la scène 5 et à la fin de l’acte 1.

Après son échange avec le Spectre et sa révélation de son meurtre,

il a intégré l’injonction du Spectre en en faisant sa devise :

Souviens-toi de moi !

Dans laquelle le souvenir induit la vengeance.


Dans ce distique, situé à la fin du dialogue mais Hamlet ne s’adresse à personne en particulier ;

Il ne se parle qu’à lui-même (et/ou aux spectateurs).

Ses acolytes, ne peuvent pas plus comprendre les paroles d’Hamlet, qu’ils n’ont entendu celles du Spectre.

Ils sont les témoins muets, d’une scène où ils ne sont que figurants.


Hamlet intériorise la nouvelle, news ou fake news, du Spectre ;

Il la garde pour lui, ne la partage pas ; sans que l’on ne sache encore, ni nous, ni lui,

comment il va agir bien que son caractère se dévoile déjà dans ce teaser :

Car il se peut que, plus tard, je doive

Porter un de ces masques antiques. A1S5

Il cherchera donc dans le Théâtre sa réponse à sa question.


Ainsi, pour Hamlet, sa « maudite destinée » est d’être « pour tout réparer » de cette « époque détraquée » ;

"Réparer", "redresser", "détordre » !?, "l’époque", "le temps", "l’espace-temps" !?,

"ça", "tout", "tout ça" !?, est à quoi Hamlet est "destiné" !?

CELA est la question !? Etre ou ne pas être !?


En suivant, le Spectre en armure, Hamlet endosse sa destinée et se forge un destin :

Mon destin m'appelle … A1s4

Fils de roi, il est né avec une destinée ;

Fils de roi assassiné, son destin sera tragique.


"Avanie et mamelles Sont les framboises du destin"

Boby Lapointe



Pour Aristote une (belle) Tragédie est :

(1) une histoire,

(2) d’un personnage,

(3) au grand renom et d’un grand bonheur d’illustre famille,

(4) ni trop vertueux ou juste,

(5) ni à cause de (ses) vices ou de (sa) méchanceté,

(6) mais qui tombe dans le malheur,

(7) de sa propre erreur.


… du but à viser … lorsqu’on agence (compose) des histoires (1),

ainsi que du moyen de produire l’effet propre à la tragédie.

… Il faut que … l’agencement (la structure) de la tragédie (1)

soit complexe … et cette tragédie doit imiter (représenter)

des événements (1) qui suscitent crainte et pitié …

... C’est le cas d’un homme (2) qui, sans être incomparablement

vertueux et juste (4), se retrouve dans le malheur (6)

non à cause de ses vices ou de sa méchanceté (5) mais à cause

de quelque erreur (7) – l’un des hommes qui jouissent d’une grande

réputation (renom) et d’un grand bonheur (3),, tels Œdipe, Thyeste

et les membres illustres de familles (3) de ce genre.

Pour être belle, il faut donc que l’histoire (1) soit simple, …

que le retournement de fortune se fasse… du bonheur vers le malheur (6),

et soit provoqué non par la méchanceté (5) mais par une erreur grave (7)

du personnage, … - POETIQUE Ch. XIII


(1) Une histoire, un agencement d’événements …

Ce qui définit d’abord la tragédie est la structure de l’histoire et l’enchaînement de faits ;

Ce qui arrive à un personnage qui agit.

Le personnage placé dans une situation, doit s’en dépêtrer et conduire l’action jusqu’à son terme (le chapitre XIII confirme le chapitre VI).

L’histoire, est première, sur les caractères et les pensées.

Si un homme est le sujet de l’histoire, c’est d’abord par ses actions & ses réactions ;

Son caractère est révélé par ses choix (& non choix) d’actions ;

Ses pensées s’expriment à travers ses mots.

Hamlet en actions : il va parler au Spectre, crée une pièce, ne tue pas le Roi, tue Polonius, s’échappe du piège de l’Angleterre, accepte le duel, tue le Roi.

Hamlet en caractères : téméraire ou impulsif ? Réfléchi ou velléitaire ? Intellectuel ou guerrier ?

Hamlet en pensées : il se dévoile en 7 soliloques ponctués de distiques sentencieux.


(2) Un personnage tragique, position « royale », d’un homme « normal » !?

Hamlet, ce héro, normal ?

La tragédie n’est pas un spectacle chorale ;

C’est une histoire qui arrive à un homme (ou une femme).

Hamlet, à travers ses soliloques nous contera SON histoire.

Le nom partagé entre le père et le fils a pu lancer un débat sur la tête qui supportait le rôle-titre ; si Hamlet-père hante la pièce, c’est bien Hamlet-fils qui subira la tragédie.

Si plusieurs histoires se mêlent et se mirent : l’amour d’Ophélie, la vengeance de Laerte, l’exercice du pouvoir du Roi Claudius et les ambitions dynastiques de Fortinbras, seul Hamlet aura l’étoffe d’endosser le poids du tragique.

Et il sera le seul mort porté en triomphe !

* Le déséquilibre est tel entre Hamlet aux 7 soliloques et les autres personnages,

que metteurs en scène, lecteurs et commentateurs, doivent raconter des histoires

entre les lignes, pour leur donner consistance & pensées.

En dépit de sa position sociale, sa normalité découle de ses actions.

Il ne lutte pas pour le pouvoir, mais se débat dans sa situation familiale.

Sa position est « royale », mais son problème est « normal », commun au commun des mortels.

Encore aujourd’hui, ces problèmes de famille recomposée nous parlent !


Position « royale », destinée par naissance ?

Né fils de roi, Hamlet est né :

That ever I was born

Hamlet est bien né, donc né avec une destinée.

Fils de paysan, d’artisan, de bourgeois, la destinée n’aurait pas été dans ses langes ;

Bonne ou mauvaise, une fée ne se serait penchée sur son berceau, que par accident ou par hasard.

On ne naît pas égaux en destinée ; si chacun peut se la forger, certains naissent coiffés.

Les fils de roi naissent dans l’Histoire, leur histoire naît dans l’Histoire ;

Là où d’autres doivent en forcer l’entrée.

Depuis la Grèce antique, les personnages « royaux » sont des personnages à destinée, destinés par naissance, et sujet de tragédie.

Shakespeare a puisé dans l’Histoire, plus ou moins connue (celle du Danemark), pour en extraire une histoire, une situation & un personnage.

Créer une histoire s’est créer un destin ;

Etre dans l’Histoire, c’est être dans la destinée.

Puiser une histoire dans l’Histoire, c’est puiser directement à la source de la destinée.

La dynastie dicte la destinée !

Hamlet constate donc lui-même qu’il est destiné à être un personnage tragique.

Fils de roi, il est dans l’Histoire, né avec une destinée ;

Fils de roi assassiné, il a une histoire, il suivra son destin.


Personnage royal, personnage au-dessus de la loi « la loi c’est moi, c’est nous » !?

Les rois sont au-dessus des lois humaines, puisqu’ils détiennent à la fois le pouvoir de les édicter & de les faire appliquer.

Les crimes & guerres de succession sont d’abord des luttes de pouvoir où légalité & justice n’en sont qu’accessoires & condiments.

Dès les Tragédies grecques, la question d’une loi divine, donc supérieure se posait ;

Mais bien souvent, il ne reste qu’aux rois (& héros) que la morale & l’éthique pour tempérer leur Violence*.

Pour qu’il y ait Justice Judiciaire, il faut être soumis à une autorité déléguée, seule habilitée à faire reconnaitre litiges & crimes, victimes & auteurs.

Le personnage royal personnifie le personnage sans autre loi que celle qu’il se donne à lui-même.

*A l’autre bout de l’échelle, et à une autre époque, le cowboy,

le outlaw et l’indien seront les personnages « sans loi »,

« en dehors de la loi », dans un Ouest & une liberté mythifiés.

« Quand la Légende est plus belle que l’Histoire, imprime la Légende !»

"When the legend becomes facts, print the legend!"

"L'homme qui tua Liberty Valance" John Ford 1962


La Justice sans le Judiciaire prend alors la forme d’un pouvoir discrétionnaire pour perdre de sa superbe, intangible ou supérieure.

* « Le pouvoir tend à corrompre, et le pouvoir absolu corrompt absolument. »

“Power tends to corrupt, and absolute power corrupts absolutely.”

Lettre de John Emerich Edward Dalberg-Acton à Bishop Mandell Creighton,

5 Avril 1887

Détenteur de tous les pouvoirs, le personnage royal est son seul juge, tant qu’il s’y accroche.

Des dieux peut-être, des hommes (peuple ou pairs) sans doute, des rivaux certainement, peuvent abattre ce pouvoir absolu et le remplacer par un autre, tout autant absolu.

La lutte pour le pouvoir dans l’Histoire, se résume bien souvent à un cycle de Violence entre égaux qui peut revêtir le manteau de la vengeance.

Les luttes de pouvoirs absolus donnent l’illusion ou l’aspect de mythes entre « hommes libres » entre « égaux » non entravés ni soumis à une véritable justice.

Le personnage royal est ainsi représenté comme seul comptable de ses actions à assumer son destin.

Cette représentation/illusion permet sa mythification (élévation au rang de mythe, d’histoire référentielle) ;

Et ainsi, chaque homme ou tous les hommes, peut ou peuvent projeter, son ou leur désir, de destin & de liberté, individuellement ou collectivement.

*Le désir de destin écrit & de liberté assumée comme paradoxe

mimétique & cathartique serait à développer …

Nous nous projetons dans les personnages et leurs qualités :

Le personnage supérieur inspire crainte & envie ;

Le personnage inférieur inspire pitié & rejet ;

Le personnage égal, semblable, facilite l’identification.


La vengeance est-elle une action noble ?

La vengeance est un acte noble (ch.VI) si c’est un acte que l’on attend d’un « noble » de Tragédie ; une action « normale » pour un personnage non soumis à la Justice.

Ainsi, le spectateur, homme « normal », soumis à la Justice dans sa vraie vie, peut-il attendre un acte « anormal » pour lui, mais qu’il estime « normal » pour le personnage de la Tragédie.

Aussi, le spectateur de la Tragédie HAMLET, peut-il espérer la vengeance « normale » du personnage d’Hamlet.

*Nous sommes dans la « cohérence » recommandée par Aristote (ch. XV).

*A rapprocher de la boxe comme "noble art" !?



Conditions de la destinée : le bonheur d’une famille illustre !?


(3) jouir d’un grand renom et d’un grand bonheur, membre illustre de familles

Les 3 conditions d’éligibilité extérieures/objectives au personnage au tragique sont liées !

Il semblerait que pour Aristote, le grand bonheur, dépende du grand renom et de l’illustre famille !

Hamlet, s’il appartient à l’Histoire, c’est celle du Danemark, à la renommée toute limitée, mais acceptée par convention par le public ;

Et son grand bonheur*, est dû à sa situation/position, sociale.

*En conformité avec le ch. XIV, où le bonheur réside dans l’alliance avant tout sentiment.


Organique ou sentimental, ce grand bonheur est surtout fait de promesses :

Promesse de trône, en tant qu’héritier supposé des deux rois successifs ;

Promesse d’amour avec Ophélie et leur supposée histoire.

Ses conditions imposées d’un bonheur supposé, seront sur la sellette tout au long de la pièce.

Quand la pièce débute, Hamlet semble pourtant déjà plongé dans le malheur provoqué par le remariage de sa mère dans la foulée de la mort de son père ;

Si l’on en croit son premier dialogue et son premier soliloque de sa première scène :


LE ROI. - Pourquoi ces nuages qui planent encore sur toi ?

LA REINE. - Mon bon Hamlet, dépare-toi de ces couleurs nocturnes,

HAMLET - Mais ce que j'ai en moi n'est pas pour le spectacle,

Tout CELA n’est ni masque ni costume pour la douleur.

… Mort depuis deux mois ! …

… Un roi si excellent ; …

… En un petit mois,…

… Mariée à mon oncle, …

… CELA n'est ni ne peut amener rien de bon ! … (A1s2).


S’il y a une situation de départ de bonheur elle se situe avant le début de la pièce ;

Avant la mort de son père et le remariage de sa mère ;

Un bonheur d’enfant, inscrit dans la structure familiale sans que les rapports & sentiments ne soient évoqués autrement que dans un comparatif entre les 2 rois & maris :

… Le frère de mon père, mais pas plus semblable à mon père

Que moi à Hercule! …



Conditions d’un destin : la normalité d’un homme qui fait une erreur !?


(4) Ni trop vertueux, ni trop juste !?

Son comportement est « normal », médian.

Là intervient le caractère, après l’histoire.

Le caractère est déterminé par les actions du personnage, par la façon dont il agit et réagit.

Hamlet est réfléchi dans sa problématique, mais impulsif en homme d’épée.

Mais ce n’est ni un saint, ni un pervers.


(5) Ni à cause/victime (!) de (ses) vices ou de (sa) méchanceté

*(de sa part ou de celle d’autres*) !?

On peut comprendre l’une ou l’autre, suivant les traductions.


Il n’est pas victime de ses propres turpitudes !?

Hamlet n’est pas Richard III, il ne prémédite pas ses crimes ;

Il tue en réaction :

S’il tue Polonius s’est d’un reflexe de rage, ce sera sa fatale erreur,

S’il fait tuer Guildenstern & Rosencrantz s’est en retour & désinvolture d’un pouvoir disponible,

S’il tue Laerte, c’est sans le savoir, ni le vouloir,

S’il tue le Roi, c’est de rage en réaction à la mort de sa mère, la Reine.


Il n’est pas victime d’autrui !?

S’il est victime d’autrui, c’est la conséquence de ses propres pensées et actions.

Il n’exprime pas de revendication du trône dont il reste toujours le jeune héritier,

donc il ne se pose pas comme spolié ;

Son passage du bonheur au malheur ne dépend que de lui-même.

Il ne subit les manigances du Roi, qu’en réaction à ses propres actions :

Il se trouve ou s’invente une vengeance avec le Spectre ;

Il provoque la colère du Roi avec le Théâtre ;

En tuant Polonius, il devient alors dangereux pour le Roi, son pouvoir & sa vie,

qui cherchera alors à s’en débarrasser avec les moyens dont il dispose (le pouvoir diplomatique) & les circonstances qui se présentent (la vengeance de Laerte).


De famille illustre,

Ni trop bon, ni trop méchant,

Hamlet est homme à la normalité éligible au Tragique !


(6) Cela finit mal - passage du bonheur au malheur !?

La mort, l’entassement de cadavres finit l’histoire ;

Ce drame est une Tragédie pas une comédie.

Si le piège d’Hamlet avait fonctionné, la tragicomédie finissait bien ;

Des morts, dont la sienne, aurait sans doute été évitées ;

Le méchant aurait été puni, les gentils épargnés.

Au premier sang, la comédie tourne à la Tragédie. ;

La mort de Polonius en lieu & place de celle du Roi attendue voire espérée, lance ou relance le cycle de la Violence/Vengeance ;

Et tous moururent à la fin.


(7) Quelle pourrait donc bien être sa propre erreur ? Son Hamartia ?

Une action ou une non action d’Hamlet ?

Geste impulsif, le meurtre de Polonius est l’acte déclencheur ;

Mais il a été préparé et sera suivi par un enchaînement d’actions & non actions :

· Sa révélation du meurtre du Spectre

· Sa mise en scène du Théâtre

· Son meurtre du Roi

· Son meurtre de Polonius

· Ses non Violences physiques envers la Reine

· Son envoi à la mort de Guildenstern & Rosencrantz

· Son acceptation du duel

· Son meurtre du Roi

Hamlet construit son propre Tragique en accusant le Roi, mais il le parachève en tuant Polonius.

HAMLET est une Tragédie dans laquelle son personnage-titre crée sa propre Tragédie.


Hamlet, destiné à tout réparer crée-t-il les conditions de sa propre Catharsis ?

La Catharsis est un effet de la Mimesis, mais peut-elle être aussi en être un but à poursuivre ?

Créé-t-on une Mimesis avec un objectif déterminé ?

La création est-elle effective (avec effet), ou fonctionnelle ?

La Mimesis est-elle pour soi ou pour les autres ?

Pour le public indéterminé ou un public déterminé ?


Hamlet lutte contre la mélancolie, la maladie du cœur & de l’âme :


… Mais cessons-là mon cœur! …

… Jusque-là, reste calme mon âme … A1s2

… calme, calme, mon cœur! …

… Et vous, mes nerfs, ne me lâchez pas, … A1s5

… abusant de ma faiblesse et de ma mélancolie, …A2s2


Hamlet se cherche et se trouve une forme de thérapie …

Eureka ! Les comédiens arrivent à point nommé pour lui donner une solution :

Le Théâtre, la pièce est LA CHOSE !

The play 's THE THING !

Il identifie une forme de Catharsis dans une forme de Mimesis.

Aidé du Spectre il s’était trouvé une destinée, un destin, une histoire ;

Le Spectre est la première CHOSE ;

Aidé des comédiens, il va représenter cette histoire pour chercher une forme de Catharsis ;

La pièce est la deuxième CHOSE*.

* Ces CHOSES, peut-il en être rêvé dans la philosophie d’Horatio ?

Hamlet cherche une purgation, un soulagement, un apaisement, à ses émotions, ses sentiments, son ressenti …

Hamlet cherche à sortir de sa mélancolie & de son ressentiment …

Looking for Catharsis …




II/ Violence & sentiments - Quelle Catharsis pour quelles émotions ?


Tout CELA pour qui ?

Une histoire de Violence génère des émotions dans le cœur des hommes, des humains présents à une représentation théâtrale ;

La Violence en représentation est subie par le personnage ;

Elle émeut celui qui la reçoit, le spectateur ;

Mais aussi celui qui l’émet, le comédien.


N'est-ce pas monstrueux que ce comédien, ici,

dans une simple fiction, dans le rêve d'une passion,

puisse si bien soumettre son âme à sa propre fable,

que sous son emprise tout son visage s'enflamme,

les larmes aux yeux, l'égarement dans les traits,

la voix brisée, et tout son être se pare de ses émotions ? A2s2



Parole n°2 Pleurer

Et tout cela, pour rien ! pour Hécube !

Que lui est Hécube, et qu'est-il à Hécube,

Pour qu'il PLEURE ainsi sur elle? A2s2

And all for nothing! For Hecuba! What's Hecuba to him, or he to Hecuba, That he should weep for her?


Que ferait-il donc,

s'il avait les motifs et les raisons de la passion

que j'ai, moi ? A2s2


Hamlet vient de rencontrer les comédiens et ils lui inspirent son troisième soliloque (S3).

L’émotion dans le jeu de l’acteur exalte l’émotion enfouie d’Hamlet.

Lui, le cynique qui joue le fou, est bouleversé par le jeu scénique de l’acteur.

L’émotion emporte tout sur son passage ; le tsunami émotionnel créé le chaos du cœur.

La percussion des émotions : sentiments, ressentiment, identification, entraîne la confusion des rôles : spectateur acteur, créateur.

Le Théâtre est un tout, une machine à jouer avec les sentiments, une machination qui se joue des sentiments.

Le Théâtre est une boîte blanche à quatre murs dans laquelle on ne rentre pas vierge et dont on ne sort pas indemne ;

Créateurs, acteurs, spectateurs ;

Chacun, apporte et emporte ce qu’il est, aimerait être, ou même nie être ;

Chacun joue, et son rôle et avec les rôles, avec ses sentiments & ceux des autres.


Au long de ce soliloque Hamlet prend acte et fait acte de ses émotions :

Il calme son cœur pour faire travailler sa tête :

Fi! honte à CELA!. En marche, mon cerveau

Il transformera la machine en machination :


J'ai ouï dire

que des créatures coupables, assistant à une pièce de Théâtre,

ont, par une très astucieuse scène, été frappées dans l'âme,

au point que sur-le-champ elles ont révélé leurs forfaits.

… Cette pièce est le piège où tel un rat,

J’attraperai la conscience du roi A2s2


Pour sortir de son ressentiment ;

Il aurait pu suivre la voie de la vengeance d’un Laerte et s’affronter à la mort de l’autre ;

Il aurait pu tomber dans le suicide d’une Ophélie et s’effondrer avec sa propre mort ;

Il a choisi le Théâtre, la Mimesis, pour se frotter à la Catharsis, la sienne & celle de l’autre ;

Looking for Catharsis !



HAMLET la Tragédie, est une pièce sur le Théâtre ;

*Mais ne le dite pas trop fort de peur de faire fuir les spectateurs,

ceux qui ne viennent pas au Théâtre, ceux qui en sont pourtant l’avenir (sic) !

Hamlet le Prince, est le Théâtre, tout le Théâtre ;

Son rôle joue tous les rôles : spectateur acteur, créateur, personnage ;

Il est, il joue, il pense, il agit ;

Dans ce jeu de miroirs déformants, il incarne toute de la Violence : victime, auteur, juge ;

Dans cette mise en abîme éperdue, sa destinée tragique exhale tous les sentiments de pitié & de crainte.


Personnage Tragique, Hamlet est un personnage-spectateur, un personnage-acteur, et un personnage-créateur.


Personnage Tragique, Hamlet va ressentir puis agir, puis réagir, enfin mourir

Dans ses 7 soliloques (S) Hamlet nous partage ses pensées, ses sentiments ses émotions ;

Ces 5 actions (A) correspondent à 5 morts, à 5 meurtres.

S1 Il nous apparait enfermé dans le ressentiment

Emotion réelle : remariage de sa mère & mort de son père

S2 Sa destinée est toute trouvée

Emotion réelle : annonce du meurtre de son père

S3 Décision d’action théâtrale

Emotion théâtrale et tragique : le comédien jouant Ecube

S4 Acting, Hamlet joue son rôle et le rôle qu’on lui fait jouer

A1 Meurtre théâtral dans sa création, la pièce « la souricière »

S5 Non action tragique : il épargne la Reine, sa mère

S6 Non action tragique : il épargne le Roi, non vengeance

A2 Mort de Polonius, action tragique et erreur tragique, Hamartia

S7 Acceptation de sa destinée tragique

A partir de ce point, Hamlet subira l’action, et n’agira qu’en réaction

A3 Mort des courtisans, réaction envers les messagers inconscients

A4 Duel et mort de Laerte, réaction et acceptation du défi

A5 Mort du Roi, réaction aux meurtres du Roi (la Reine & lui-même)

Hamlet sera le dernier mort de la pièce.


Personnage spectateur, Hamlet est remué par l’acteur jouant l’émotion ;

L’émotion jouée par le comédien percute les siennes ;

Hamlet ne se compare pas, ne s’identifie pas au personnage mais à celui qui le joue ;

Il ne se sent pas ému par l’histoire, mais par celui qui la conte.

*Il est temps d’aborder plus loin la problématique de l’identification.



Personnage acteur, Hamlet compare son jeu de rôle au jeu de l’acteur

Aussi peut-il se poser la question : doit-on ressentir les émotions pour les bien jouer ?

Conscient de sa destinée, Hamlet joue et surjoue un rôle qu’il s’est assigné tout seul.

Le meurtre n’étant reconnu que par et pour lui, il ne peut jouer ouvertement le rôle de la victime, et se laisser aller à exprimer ses sentiments ;

Hamlet enferme ses émotions derrière le masque du fou ;

Il est d’autant plus ému de voir un acteur libérer les siennes.


Personnage créateur, Hamlet va réécrire la pièce qu’il entend faire jouer devant le Roi

Créateur de son destin, de sa propre Mimesis Tragique, il se veut créateur de la pièce – piège, autre Mimesis Tragique pour confondre le Roi à défaut de le faire juger.

Par le Théâtre, Hamlet arrivera à mettre le Roi en colère ;

Mais il faudra la mort de Polonius pour lui instiller de la crainte.

A partir de ce point, ce Roi, qui appelait Hamlet son fils, cherchera à se débarrasser de ce fils de sa Reine.


Emotions en cascades, Identifications en abîme

Le Roi quitte en colère la représentation de son pseudo-meurtre ;

Hamlet est ému par le comédien récitant Ecube ;

Le Théâtre, et la Tragédie en particulier, représente une Violence et provoque des émotions.

L’émotion passe-t-elle par l’identification ?

Par quelle identification passe l’émotion ?


Dans le cas général & en théorie, les spectateurs ne sont pas sur scène ;

Le 4ème mur symbolise la séparation de la scène et de la salle.

Les spectateurs ne sont pas impliqués directement par & dans le spectacle.

C’est parce qu’ils en sont extérieurs, que le spectacle leur procure des émotions propres.

La Violence représentée sur scène est une Violence latente, irréelle, bien différente d’une Violence concrète, bien réelle qui toucherait directement & personnellement chacun des spectateurs.


La Mimesis Tragique (et le Théâtre en général) libère les émotions, le trop plein d’émotions, engrangées dans la vie réelle mais bien souvent réprimées pour des raisons sociales & psychologiques et qui peuvent mener au ressentiment et à toutes ses conséquences.

Le Théâtre permet de vivre émotionnellement une histoire qui ne nous concerne pas directement ; une histoire dans laquelle nous ne sommes pas impliqués dans la vie réelle mais dans laquelle nous pouvons projeter nos désirs & frustrations, nos peurs & nos joies, nos peines & nos envies, nos colères & nos satisfactions,

nos haines & nos amours ;

Et pour la Tragédie en particulier, nos pitiés & nos craintes ;

Ces émotions de la Tragédie, sans enjeu pour nos vies réelles, nous pouvons les laisser s’exprimer puis s’extirper de notre ressentiment par leur purgation.

Le spectacle cathartique d’une Violence irréelle, permet de purger dans ce monde parallèle, ces émotions emmagasinées dans un trop-plein qui pourrait déborder dans la vie réelle.

Objectivement, au niveau social & sociétal, au niveau de la cité & de la collectivité, la mécanique aristotélique parait implacable & magistrale.

Que ce passe-t-il lorsque le spectacle, la Mimésis, la Tragédie, percute la vie personnelle ?

Le créateur, l’acteur, le spectateur sont autant d’individus qui vivent le spectacle en fonction de leur vécu personnel.


Hamlet, se voulant créateur, se jouant acteur, individualise le spectateur ;

Il subjective l’audience, désobjective le public, personnalise la foule ;

Hamlet ne représente pas les spectateurs, mais chacun d’entre eux, chacun d’entre nous.

Utilisant le Théâtre à des fins personnelles, tout en nous partageant ses pensées,

Hamlet nous demande, à chacun, de nous positionner sur cette CHOSE qu’est le Théâtre

et sur CE que sommes-nous pour le Théâtre ; CE que le Théâtre est pour nous.


Le Théâtre grec antique racontait des histoires de rois, de héros, de dieux.

En puisant ses histoires dans l’Histoire collective dans la mythologie, pas de risque de raconter une histoire réelle dont les protagonistes seraient parmi l’auditoire.

Bien sur, avant-hier comme hier, comme aujourd’hui, les puissants de la Cité pourront toujours s’identifier & être identifiés aux puissants de Tragédie ;

Cathartique, le Théâtre, n’en est pas moins politique.

Le spectateur est de la ville, le Théâtre est dans la ville ;

Nous n’arrivons pas neutre au Théâtre, le Théâtre n’est pas neutre dans la vie de la Cité.


Personnages et histoires, bien qu’issues d’un certain réel, sont en dehors du réel quotidien.

La Catharsis Tragique fonctionne à plein quand tous les éléments de la Mimesis sont LATENTS, en dehors du CONCRET.

Lorsque le CONCRET s’insère dans le LATENT, l’équilibre est rompu.


Face à une Tragédie, en fonction de ce que nous sommes, nous pouvons ressentir de la pitié pour autrui, de la crainte pour nous-mêmes ;

Spectateur d’une représentation d’une Violence, nous pouvons ressentir de la pitié pour la victime, de la crainte de l’auteur du crime.

Pour le spectateur :

… La pitié s’adresse à l’homme qui est dans le malheur sans l’avoir mérité

La crainte s’adresse à notre semblable …

Aristote ch. XIII ,confirmé dans LA RHETORIQUE.


* A confronter et croiser avec le rapport du spectateur à la « noblesse » du personnage

(déjà évoqué plus haut) :

Nous nous projetons dans les personnages et leurs qualités :

Le personnage supérieur inspire crainte & envie ;

Le personnage inférieur inspire pitié & rejet ;

Le personnage égal, "notre semblable", facilite l’identification.


En fonction de ce que nous sommes, nous pouvons nous identifier à un ou plusieurs personnages, protagonistes et/ou caractères, alternativement et/ou successivement ;

Mais, il n’y a pas de raisons de s’arrêter en si bon chemin et nous pouvons également nous identifier à tout ou partie de l’histoire, à un ou des acteurs, au créateur.

Evoquons l’analogie avec une Mimesis intime : le Rêve ;

Nous saurions être un personnage du Rêve, tous les personnages du Rêve, le Rêve dans sont entièreté et le Rêveur bien sûr.


Catharsis Thérapeutique

Hamlet tente une sorte de Catharsis Thérapeutique.

Posons qu’il pourrait y avoir Catharsis Thérapeutique quand les victimes & auteurs de la Violence représentée/imitée par la Mimesis sont identifiés et/ou s’identifient, se reconnaissent et/ou sont reconnus personnellement.

Hamlet, le personnage, la victime secondaire réelle d’un meurtre qu’il veut croire réel, crée une Mimesis Tragique pour confondre l’auteur de son réel ;

Le Roi meurtrier doit s’identifier, se reconnaitre dans l’auteur du crime mimétique de la pièce.


Une Mimesis serait ainsi DECALEE et/ou TRANSPOSEE, quand on représente/imite une action & ses personnages, mais que l’on en change les noms et/ou la situation (d’autres combinaisons sont possibles).

Shakespeare, comme Molière et bien d’autres, ont pu ainsi mettre des éléments réels de la cour & de leur société, dans une histoire ou des personnages irréels.


L’imitation/représentation de personnages et d’histoires bien arrimées à la vie réelle, s’émancipe de la conception aristotélique de LA POETIQUE, se détache de la Grèce antique, pour voguer sur d’autres eaux, sous d’autres cieux, vers d’autres horizons.

Des pièces de Théâtre Thérapeutique ont ainsi pu être créées au XXème et XXIème siècle avec pour créateurs et/ou acteurs de vraies victimes (rescapées ou secondaires) d’incestes, de génocides et autres Violences, individuelles ou collectives.

La Catharsis est alors appelée autant dans la salle que sur scène.


La Mimesis se veut Thérapeutique, quand le Théâtre est appelé au chevet des protagonistes d’une Violence concrète avec la volonté de l’apaiser.

Cette volonté, cet acte de création, Thérapeutique, peut émaner d’une autorité tierce (thérapeute de toute forme), mais également des victimes elles-mêmes, et sans doute plus rarement des auteurs de la Violence.


*Il n’est pas sûr que pour un auteur de crime qui se mue

en auteur littéraire ou créateur de spectacle, le souci de rédemption

ou de Catharsis, l’emporte sur la délectation et l’autosatisfaction !

*Une Catharsis peut ne pas se réaliser ;

Cela a sans doute peu de conséquences pour la Catharsis Tragique ;

Quoi que l’on a pu trouver dans l’excès de Violence dans des films

ou des jeux vidéos une certaine causalité au passage à l’acte dans la vie réelle ;

Et pourrait-on parler d’échec pour la Catharsis Thérapeutique ?


La Mimésis est affaire d’émetteurs : créateurs & acteurs ;

La Catharsis est affaire de récepteurs : spectateurs & publics ;

Dans le Théâtre Thérapeutique, émetteurs & récepteurs peuvent se confondre & s’entrecroiser.


ALERTE DIGRESSION ! ;)

Catharsis Médiatique - Théâtre Médiatique

Lorsque, dans notre monde hyper médiatisé par Internet et les réseaux sociaux

le spectateur & internaute devient acteur & créateur, la confusion est totale.

La spécificité d’une Catharsis Médiatique est que la Mimésis Médiatique est devenue

l’affaire de tous (ou de qui veut) et se réalise quasiment en temps réel.

Nous sommes bien passés de La Société du Spectacle à La Société du Spectateur.


#MeToo, #BalanceTonPorc créent des Mimesis Médiatiques,

à partir d’histoires individuelles qui se veulent faits collectifs.

Ces récits palliant la lenteur ou le déni de la Justice et étant plus directs

que toute forme de spectacle, cherchent une forme de Catharsis Médiatique,

palliant les défiances & insuffisances des Catharsis Tragique et Judiciaire.

Chacun & tous sont ensemble, montent sur scène, occupent & submergent

l’espace médiatique pour raconter son histoire, leur histoire, notre histoire.

Le 4ème mur (les murs séparent autant qu’il soutiennent) est définitivement abattu

lorsque la Catharsis l’emporte & prend le pas sur la Mimesis :

Tu cherches la Catharsis ? Crée ta Mimesis.

Tu es une victime en manque de reconnaissance, de Catharsis ?

Représente-toi en victime médiatique,

tu trouveras des auteurs dans cette Violence devenue Médiatique.

Ton histoire individuelle deviendra histoire collective ;

Ta Thérapie deviendra Catharsis.

Du lynchage & de la sanctification médiatique peut-il surgir la rédemption ?

Pour répondre, il nous faudrait invoquer René Girard et appeler à sa résurrection ;)

Si la mécanique mimétique d’Aristote a pu nous conter la Catharsis Tragique

comme le passage d’une Catharsis Religieuse à une Catharsis Judicaire ;

La mimétique de René Girard peut nous en raconter sur les processus de mythifications modernes

qui vont bien au-delà de celles de Roland Barthes.


La résolution de la Violence peut-elle être Médiatique ?

La Violence concrète peut-elle trouver son apaisement dans les Médias ?

La Violence Médiatique, peut-elle trouver sa résolution dans les Médias ?

Nous avons des victimes & des auteurs qui entretiennent le cycle de la Violence ;

Quelle autorité pour former & fermer le triangle de la résolution ?

LE TEMPS peut-être !

Qui peut venir à bout de ce phénomène de foule incontrôlée & incontrôlable ?

La parole (Autorité), parfois, la force armée (Pouvoir), souvent, LE TEMPS inexorablement !

Seul LE TEMPS peut calmer une foule ;

Seul LE TEMPS peut apaiser un (mouvement de) Panique.


Si cette Violence Médiatique n’appelle pas et ne se transfert pas en Violence concrète

(par ex. le meurtre du Professeur Samuel Paty), elle reste dans la sphère Médiatique

et la résolution du conflit se doit d’être elle aussi Médiatique.

Comme pour l’art, l’autorité de la Mimésis Médiatique est le créateur ;

Or, ce créateur est la somme des chacun, de tous ceux qui prennent la parole.

Pour qu’il y ait Catharsis, il faut une Mimesis, la médiatisation d’une histoire de Violence qui créé des émotions.

Ces émotions sont purgées quand l’histoire trouve son épilogue.

Dans la Mimesis Médiatique, l’histoire finit quand tous, chacun des chacuns a dit ce qu’il avait à dire.

Comme dans la Tragédie, cette fin peut être une forme de mort : le lynchage médiatique.

Comme dans le Judicaire, une Violence peut finir par épuisement & oubli.

LE TEMPS (long), peut jouer en faveur de la Justice ( !), l’oubli par épuisement à long terme ;

L’épuisement & l’oubli sont nettement plus rapide, dans LE TEMPS Médiatique ;

Epuisement & oubli par superposition ; une affaire chasse l’autre.

Epuisement & oubli par dilution ; affaire de temps & affaire d’espace ;

L’emballement Médiatique est parent de la Panique ;

Le danger de la Panique s’est l’engorgement ;

Une foule s’entasse et s’écrase dans un étroit couloir ;

Une foule s’étale et se disperse sur une grande place ;

Mécanique des fluides.



Aux différents styles d’Agôn, Agôn en joutes : Théâtres, procès, messes, jeux, débats, …

ou Agôn en scènes : tréteaux, tribunaux, églises, stades, écrans … ;

Correspondent différents styles, de Mimesis, de spectacles, pouvant s’imbriquer, se combiner, s’articuler … ;

Générant autant de Catharsis qui se superposent, se croisent, s’enchevêtrent … ;

… en ce monde :

… (Je tiens) ce monde (pour ce qu'il) est un Théâtre où chacun doit jouer son rôle ...

Le Marchand de Venise - William Shakespeare


Pour la notion d’Agôn :

Soulier Gérard. Le théâtre et le procès. In: Droit et société, n°17-18, 1991. Droit et jeu. pp. 9-24;


Personnage, créateur, acteur, spectateurs,

Hamlet est tout à la fois ; et ce tout c’est nous ;

Hamlet le personnage, c’est nous ;

HAMLET la pièce, c’est nous.


Le personnage Hamlet est né avec une destinée ;

Créant son destin il créera sa Tragédie ;

Ce créant une vie, il créera les conditions de sa mort.




III/ Catharsis & mort - La Catharsis & la résolution de la Violence ?


Tout CELA comment ?

La purge est affaire de finitude ;

La Catharsis s’opère lorsque la Mimesis s’achève.

La Violence procure des émotions qui s’évacuent, se purgent, s’apaisent

à la fin de l’histoire ;

La mort est la première modalité de fin d’une Tragédie ;

Mais la fatalité doit-elle d’être fatale ?

Cette facilité de scénariste est-elle nécessaire pour être exemplaire ?

La destinée tragique est-elle condamnée à être sacrificielle ?

La Catharsis du spectateur en passe-t-elle par la mort du personnage ?


« Le Théâtre comme la peste est une crise qui se dénoue

par la mort ou par la guérison».

Antonin Artaud - Le Théâtre et son double - FOLIO ESSAIS p. 46


Parole n°3 Purger

Votre sagesse aurait fait montre de plus de richesse

En allant en instruire le médecin ; car, pour moi,

Si j'essayais de le PURGER, je le [le Roi] plongerais peut-être

Dans une plus grande colère. A2s2

Your wisdom should show itself more richer to Signify this to his doctor; for, for me to put him To his purgation would perhaps plunge him into far More choler.


Hamlet constate sa demi-victoire.

Le Roi a quitté la représentation en grande colère.

Le Roi a réagi ;

La Mimesis violente lui a provoqué de l’émotion.

Hamlet tient sa preuve !

Hamlet peut s’auto-convaincre que le Roi est le meurtrier de son père dont son spectre l’a auto-convaincu de sa victimisation.

Le spectre s’est reconnu victime d’un meurtre, mais auprès du seul Hamlet ;

La pièce a reconnu le meurtrier, mais pour le seul Hamlet.

Ses reconnaissances Judiciaires (victime & meurtrier) sont la trame de l’histoire aristotélique de la Mimesis qu’Hamlet se joue à lui-même.


Mais Hamlet constate également son demi-échec.

L’histoire n’est pas encore terminée ; ni pour lui, ni pour le Roi.

Hamlet a pu inspirer une forte émotion au Roi, mais il n’a pas les moyens de la purger.

Il ne peut que le mettre en colère, sans lui faire avouer le meurtre.

La Mimesis Tragique, la pièce dans la pièce, prend fin sans Catharsis :

La Catharsis Judicaire ne peut émaner d’une Mimesis Tragique.


Le fin mot de l’histoire, la fin de l’histoire de « la souricière », n’aura pas lieu pour les personnages mais pour nous spectateurs.

Nous serons les seuls témoins de l’aveu du Roi dans sa pseudo-prière.

Nous serons les seuls témoins des atermoiements d’Hamlet devant le Roi en prière.

Pour nous seuls, la cause est entendue, Justice est dite, à défaut d’être faite :

Le Roi est coupable, la reconnaissance est achevée.

Dans la foulée, dans le même mouvement, dans la suite de la même séquence des événements, Hamlet acculé & surpris en pleine « scène » dans la chambre de sa mère, aura le (mauvais) reflexe de se faire Justice lui-même en tuant « le rat » derrière le rideau, Justice aveugle qui « rat »era sa cible.

Ce sera son Hamartia, l’Erreur Tragique du personnage d’Hamlet ;

Le nœud, le basculement de la Tragédie.


L’histoire de « la souricière » se termine par un « rat »age, avec la mort d’un « rat », mais sans doute pas le « rat » souhaité.

Le « rat » mort eut-il été le Roi, la tragédie trouvait là son dénouement.

Hamlet-fils vengeait Hamlet-père,

La succession au trône pouvait s’effectuer par le sang versé (si Hamlet en avait le pouvoir ou l’autorité).


Le « rat » mort Polonius ne sera pas le mort bouc émissaire pour autant ;

Loin de stopper le cycle de la Violence, il le relancera.

Le Roi ne reconnaitra ce meurtre ni dans une cérémonie, ni dans un procès :

Il accompagnera & instrumentalisera Laerte dans sa vengeance.

La colère du Roi s’est muée en peur ;

Il essaiera de sortir de sa peur d’Hamlet en cherchant sa mort par tout moyen.

Laerte pris à son tour dans la spirale du trou noir de la Violence, exigera sa vengeance.

Et tous mourront à la fin.


L’émotion ressentie par le Roi lors de la représentation, loin d’être purgée aura été exacerbée ; la colère sans doute, la crainte certainement, pour sa vie et son pouvoir.

Autant Hamlet recherchait une Catharsis Judiciaire, autant le Roi par la prière a recherché une Catharsis religieuse ; cette purgation-rédemption ne s’effectuera pas plus que l’autre.

LE ROI. - Mes mots s'envolent ; restent mes pensées.

Les mots sans les pensées, au ciel ne peuvent s'élever. A3s3


Nous ne saurons jamais si sur l’ensemble du public de la « souricière » la Catharsis Tragique s’est effectuée.

Que nous importe, la Catharsis recherchée par Hamlet, n’est qu’une affaire personnelle, ne concerne que lui et l’autre, Hamlet et le Roi :

C'est une œuvre infâme ; mais que nous importe !

Votre Majesté et moi avons la conscience tranquille,

Nous ne pouvons nous poser des questions sur les effets de cette pièce que sur des membres individualisés de cette audience ; certains protagonistes identifiés.

La Catharsis peut-elle se réaliser sur des protagonistes de l’action originale, représentée, recréée, Mimésisée (sic) ?


Concernant le Roi ;

Une Catharsis (quelle quelle soit) peut-elle s’exercer sur l’auteur d’un crime qui assiste à une reconstitution Tragique (même transposée) de son crime ?

Concernant Hamlet ;

Une Catharsis peut-elle se réaliser pour une victime (ici secondaire) qui crée une reconstitution Tragique (même transposée) du crime

Chez le Roi, protagoniste-meurtrier, cela semble donc échouer ou se non réaliser ;

Chez Hamlet, protagoniste-victime, il semble bien qu’il se passe quelque chose !


Hamlet a-t-il créé sa propre purgation, sa propre Catharsis ?

Hamlet, après la pièce et la mort de Polonius serait-il purgé ?

Son erreur meurtrière est-elle la fin de l’histoire pour lui ?

Après CELA, il ne cherchera plus la vengeance.


La colère du Roi pendant la représentation de sa souricière a apporté à Hamlet une certaine satisfaction, une jouissance certainement et une bien réelle excitation.

Le meurtre de Polonius éteint cette excitation.

Son ressentiment semble s’être évanoui du même coup.

Il semble assumer son acte ;

Et son cynisme tourne au fatalisme.

Après son acte violent (qu’il renouvèlera, cette fois-ci sans erreur, en faisant tuer Guildenstern & Rosencrantz) sa vengeance disparaît.

La pièce & son épilogue derrière le rideau*, ont agi sur ses émotions ;

*Le rideau du Théâtre s’est mué en rideau du meurtre.

Son ressentiment s’était changé en excitation avec la pièce ;

Son excitation s’est éteinte avec son meurtre ;

Sa vengeance s’est évanouie avec cet épilogue, concret pour lui, éphémère ou provisoire pour la suite de la Tragédie.


Cet état d’esprit sera confirmé dans son dernier soliloque (S7) A4s4,

Plus que sa lâcheté (*le lâcher prise ?), Hamlet constatera sa non volonté d’action de vengeance.

L’acte de Violence, est alors déconnecté de la volonté de vengeance.

Le spectacle (*encore lui) de l’armée de Fortinbras marchant à la bataille & la mort pour un lopin de terre, une coquille d’œuf, un rien, lui inspire la déconnection entre la « grandeur » et la cause ;

Seul compterait alors l’honneur à sauver et à défendre ;

La posture avant la cause.

Il a beau ressentir le désir du désir d’action & de vengeance de Fortinbras ;

Il accepte son destin avec une vaine rodomontade ;

Allons, et à partir de maintenant,

Que mes pensées soient sanglantes, ou retournent au néant A4s4,

Ces « pensées » pourront être « sanglantes » elles ne se transformeront pas en actions pour autant.

Ce dernier soliloque marque la fin de ses atermoiements, la fin de ses pensées, existentielles.

Il ne se confiera plus au public mais au seul Horatio.


Confronté à sa vengeance, à sa Violence, Hamlet a affronté en pleine conscience le tragique de sa vie ;

Il finit par constater l’inutilité pratique de cette position,

Placé en situation tragique, il n’a pas agi en personnage mais en créateur.

Pour nous, spectateur, nous l’avons vu essayer de réécrire une Mimesis, imitation d’une imitation ;

Mais pour lui, sur scène, il ne peut échapper à son destin de personnage.

Fortinbras comme Laerte, comme tous les personnages, agissent conformément à leur personnage tragique ;

Hamlet s’est débattu, a débattu seul avec lui-même, pour contrôler son destin ;

Mais se faisant il a créé seul son propre tragique.

Lui seul entend le Spectre ; [AUTO-CITATION]

Et pour lui seul la mort de son père est reconnue comme un meurtre.

Seul, il a créé la pièce et mis le Roi dans un état de colère, puis de crainte.

Seul il tue Polonius ;

Sa Mimesis dans la Mimesis prend alors fin ;

Plus jamais il ne sera question du meurtre de son Père ;

Mais cette fin n’est que pour lui seul.

Le cours des événements lui échappe alors.

N’écrivant plus l’histoire, il la subit ;

Il ne fera qu’agir en réactions aux actions du Roi qui cherche à le tuer.

Les actions violentes d’Hamlet ont entretenu le cycle de la Violence en créant un prétexte (et une provocation) à la Violence du Roi.

Il n’a pu créer une Catharsis que pour lui seul.

Il a apaisé ses propres émotions, mais provoqué celles des autres ;

Il a apaisé son désir de Violence, mais exacerbé celui des autres.

Il ne pourra échapper à son destin, mais il en acceptera la fatalité :


Si mon heure est venue,

Elle n'est pas à venir ; si elle n'est pas à venir, elle est venue ;

Si elle n’est pas venue, alors elle est à venir :

Il convient d'être prêt ; voilà tout ;

Puisque l'homme n'est pas maître de ce qu'il quitte,

Qu'importe qu'il le quitte de bonne heure! C’est l’heure ! A5s2


A défaut d’une Mimesis Judicaire, Hamlet a créé une Mimesis Tragique ;

A défaut d’une Catharsis Judicaire, Hamlet a-t-il trouvé sa Catharsis Thérapeutique ?




Conclusion


Hamlet ce joueur invétéré & incurable !?

Hamlet s’est trouvé un destin pour essayer de lui échapper ;

Mais échappe-t-on à ce qui est écrit, lorsqu’on l’a écrit soi-même ?

Hamlet a joué, il a perdu ! Entraînant tous les protagonistes avec lui dans la mort.

Il a joué au Théâtre, il a joué au fou, il a joué avec la colère des autres.

Mais on ne raconte pas impunément des histoires à dormir debout, dans un monde où tout se règle à coups d’épée ou de poisons.

Le Théâtre lui a apporté une brève jouissance d’une petite mort, une satisfaction éphémère d’un rêve éveillé :


Mourir,

Dormir rien de plus, et en dormant dire en finir avec

Le mal du cœur et les milliers de plaies

Dont cette chair souffre. C'est le dénouement

Ardemment souhaité. Mourir, dormir,

Dormir; par chance rêver, mais quelle chance ?

Car dans ce sommeil de la mort

Quand nous nous dépouillons de notre mortelle défroque.

Quels rêves pourraient venir nous accorder une trêve. A3s1


Le Théâtre lui a accordé sa trop courte trêve ;

Mais par son meurtre de Polonius, par son erreur Tragique, son Hamartia, Hamlet a relancé le cycle de la Violence ;

Fin de partie ; le jeu de rôle bascule en « roulette russe » ;

La comédie dramatique sombre dans la Tragédie sanglante.

Apprenti-sorcier, il joue avec les outils qu’il a sous la main !

Les comédiens débarquent, il en fait ses marionnettes ;

Un rideau bouge, il tire l’épée.

Apprenti-Roi, les hommes sont des pions qu’il apprend à sacrifier !


Le sang versé le tire de son état victimaire sans pour autant lui transférer le statut d’auteur d’un crime qui ne sera reconnu par aucune autorité.

Son erreur mortelle lui révèle son impunité d’homme destiné au pouvoir ;

Et l’enjeu de hommes de pouvoir se compte en vies humaines, celle des autres mais aussi la leur.

Entre gens d’un monde sans Justice, les conflits se règlent au mieux à l’épée, au pire au poison.


Hamlet a fait jouer au Théâtre son rôle d’exhausteur des émotions.

Il a instrumentalisé le Théâtre et s’est excité de la colère du Roi.

Mais la purgation des émotions ne s’est pas réalisée une fois le rideau retombé ;

Son exaltation spectaculaire ne s’est dissipée que dans le crime derrière un autre rideau.

Après cette crise paroxysmique, la mélancolie suicidaire d’adolescent, alimentée de ressentiment familial se mue en fatalisme teinté de cynisme ;


En s’extirpant de son chaos émotionnel par l’épée, le sang et la mort, Hamlet a rejeté chez les autres protagonistes la patate chaude de la Violence ;

Réveillant les manigances fatales chez le Roi ;

Eveillant un désir de vengeance funeste chez Laerte ;

Menant Ophélie à une folie suicidaire.

Pour dénouer sa crise mortifère, il se trouve une histoire « qui l’y mène tout droit ».

La guérison ou la mort (Voir A Artaud, cité plus haut) !

Ne trouvant pas la première, il ne peut que provoquer la seconde.

Trouvant la seconde, il nous apporte la première.


Hamlet joue aussi avec nos émotions ;

La Violence des événements & des personnages nous saisit ;

Son caractère insaisissable nous égare ;

Et en nous partageant ses pensées mortifères & sanglantes, il nous oblige à penser.

Le « spectacle affligeant » du carnage final, met fin à toutes les tensions.

La mort de tous les protagonistes nous purge de toutes nos émotions.

Mourir est le lot de tout un chacun, mais en attendant, vivre ne suffit pas, encore faut-il exister ! Etre ou ne pas être !

Mourir & rêver, vivre & exister :


Est-il plus noble pour l'esprit de souffrir

Les traits et les flèches d'une outrageante fortune,

Ou de prendre les armes contre une mer de tourments

Et en les affrontant en finir avec tout CELA ? A3s1


CELA reste la question

La Mimesis Tragique raconte une histoire de Violence ;

Cette histoire de Violence provoque des émotions chez le spectateur ;

L’histoire à une fin, la Violence cesse, s’apaise, le conflit est résolu ;

Les émotions sont purgées, la Catharsis s’est réalisée.


L’achèvement du récit par la résolution de la Violence,

Sont les conditions de la purgation des émotions.

Pour que la Mimesis de l’artiste se transforme en Catharsis pour le spectateur,


La Mimesis est CHOSE d’artistes ;

La Catharsis est CHOSE de spectateurs ;

LES spectateurs, mais aussi LE spectateur ;

Quand CE spectateur est impliqué dans LA CHOSE,

CELA devient la question.


Avec l’absence de neutralité l’objectivité vole en éclats ;

Avec l’instillation du subjectif, la Poétique aristotélique s’humanise.


Aristote a eu beau nous démonter pièce par pièce sa mécanique, la Mimesis;

Nous ouvrir en grand les parois de cette boîte blanche, la Tragédie ;

Il nous a bien laissé le soin de décider à quoi CELA pouvait bien servir …, la Catharsis.


Des CHOSES cachées (*ou pas) depuis la fondation du Monde … Poétique …


CELA est la question …


A suivre* …



*J’espère ne pas m’être abîmé dans cette mise en abîme ;

Ne pas m’être trop perdu dans ce labyrinthe de miroirs.



Merci à vous pour CELA :

Stéphane Zagdanski dont le « swing » de son séminaire a irrigué mes pensées ;

Cynthia Fleury pour m'avoir mis à l'esprit la notion de Ressentiment ;

Et Lo Schuh pour me permettre d’entendre mes mots.



"Heureux soient les fêlés, car ils laisseront passer la lumière."

Michel Audiard


9 mai 2021


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